CUT | Le magazine du court métrage
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« Luc Besson perdu dans les étoiles » après la chute de sa société EuropaCorp »

La société a été placée en procédure de sauvegarde, mettant fin au rêve du producteur de sortir du système français de films à budget modeste et à vocation domestique, observe l’éditorialiste économique du « Monde », Philippe Escande.

Pertes & profits. Deux comètes sont entrées en collision, lundi 13 mai. Pendant que le président de la République, Emmanuel Macron, recevait à déjeuner la fine fleur de la création française en réaffirmant l’importance de l’industrie culturelle française face à l’hégémonie américaine, le réalisateur Luc Besson déposait le bilan de sa société EuropaCorp devant le tribunal de Bobigny. Son entreprise, qui se voulait la plus ambitieuse d’Europe en matière d’industrie cinématographique, s’est écrasée sur le mur des réalités. Comme son héros favori, Valérian, Besson se retrouve seul, perdu dans les étoiles, tentant de sauver ce qui peut l’être.

L’entreprise, placée en procédure de sauvegarde, échappe momentanément à ses créanciers, et à sa dette dépassant les 220 millions d’euros, le temps de trouver une solution pérenne dans les six mois. Celle-ci passera par une réduction de la production et la poursuite de la vente de pans entiers de son activité. Si les films très commerciaux d’EuropaCorp reçoivent rarement les louanges de la critique, ils sont devenus essentiels à la santé de cette industrie tant vantée par notre président, représentant souvent plus de la moitié des exportations françaises.

Nouvelles poches profondes

Le rêve d’EuropaCorp était de sortir d’un système français de films à budget modeste et à vocation domestique vivant confortablement grâce à une réglementation unique au monde mais à bout de souffle. En France, le film est déjà vendu, notamment aux chaînes de télévision et aux distributeurs, avant la vente du premier billet. Il est aidé aussi par une taxe sur le prix des tickets. Un système vertueux pour l’Etat qui par ses obligations fait financer le septième art par la télévision et les succès américains. Mais le cinéma n’intéresse plus la petite lucarne qui ne jure que par les séries et le sport. D’où les tentatives pour trouver de nouvelles poches profondes du côté des investisseurs privés, intéressés au succès commercial. Avec l’idée que, pour y parvenir, il faut créer des franchises (comme la série des Taxi ou des Taken) et produire beaucoup pour répartir le risque. En bref, faire comme Disney avec ses Star Wars et autres Avengers.